L’eau ñ

L’eau  dans  la production culturelle

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L'eau et le désert,  "À la source du Petit Prince " - Article aliment-et-developpement.com - Mars 2017


En production culturelle, comme en toute autre production, il semble difficile d'approcher un sujet sans une référence. S'agissant de "l'eau et du désert", Le Petit Prince [1] en est une. Et l'on sait que le désert n'est pas que la rencontre d'une caravane ou de migrants avec une étendue de sable hostile, mais aussi toutes sortes de rencontres du quotidien, ne serait-ce que celles avec soi-même.  Aliment et développement.com relaie "À la source du Petit Prince" [2] 

« - Tu as donc soif, toi aussi ? lui demandai-je.

Mais il ne répondit pas à ma question. Il me dit simplement :

- l’eau peut aussi être bonne pour le cœur…

… Il dit encore :

- les étoiles sont belles à cause d’une fleur qu’on ne voit pas…

Je répondis " bien sur "…

- Ce qui embellit le désert, dit le petit prince c'est qu'il cache un puits quelque part…

Comme le petit prince s’endormait, je le pris et me mis en route…En marchant ainsi, je découvris le puits au lever du jour.

Ainsi donc, il y a de l'eau dans le désert, il y a de l'eau au désert! L’essentiel, c’est de rencontrer le mystérieux rayonnement du sable qui cache une source. C'est alors que tout commence à nouveau… ! Cela fut vrai pour Le Petit Prince et son ami l'aviateur et tant d'autres… comme A. Camus, devant un  tableau de Piero della Francesca [3 et 4].

Mes rencontres, je suis quelques fois amenée à me demander si c’est moi qui les programme ou si c’est elles qui m’attendent depuis toujours ou encore si c’est de consensus, un rendez-vous. Je m'en rappelle une à Paris. Je voulais tout voir.  Ainsi, je décidai d’aller au hasard dans ma visite.  À la sortie d’une station de métro, j’abordai une personne assez pressée. Voyant que je désirais lui parler, elle s'arrêta.

- Puis-je vous renseigner ? fit elle.

- Bonjour ! Est-ce qu’il y a quelque chose à voir dans le coin?... 

Elle me dévisagea.

- C’est une grande avenue, juste là, devant vous ! Mettez-vous à une table de ce café, au coin de la petite rue en face, et regardez…Vous verrez ce que vous ne verrez nulle part ailleurs… et même pas à cet endroit en y revenant, dans une heure, demain, dans un an… Il y a toujours quelque chose à voir…

- Merci ! La réponse me satisfit. Je crois avoir déjà lu quelque chose de semblable, mais je n’y avais jamais pensé…

 C’est juste une parenthèse à ce qui va suivre. Ainsi pour dire que toute rencontre a sa particularité, laquelle peut bien être "L’eau est aussi bonne pour le cœur !" du jour.

Ce soir, je montais dans un bus et une jeune femme en descendait. Elle criait " laissez-moi…!".   Dans le bus tout était silencieux et les regards étaient posés sur un homme, la quarantaine passée. Il était débout près de la porte descente du bus. L’homme vint s’asseoir en face de moi et me fixa du regard.  Un peu gênée je lui souris, alors il me tendit la main.

- Vous savez pourquoi cette personne crie ? parlant de la jeune femme qui descendait lorsque je montais.

- Non, qu’est-ce qui lui est arrivé ?

-  Elle était assise là où vous êtes et moi à cette même place. Je lui disais que j’apprenais à boire et à manger à un chat, un petit, tout petit, mais qu’il ne se laissait pas prendre ! Quand je veux l’attraper, hop il fuit… !

Parlant du chat, chaque mot prononcé était suivi d’une mimique.

- Rien que ça ? c’est dommage ! fis-je

- ça ne vous fait pas fuir, vous ?

- Non ! et pourquoi… ?

- Vous me croyez alors ?

- Si vous le dites, c’est que c’est vrai ! Tout dépend de ce que vous appelez un chat, et cela ne me regarde pas !

Il ne me laissa pas continuer et répliqua.

- Tout dépend également de ce que j’appelle boire et manger, n’est-ce pas ?

- Exactement, le symbole ! fis-je. Il se peut bien que la dame ait donné un autre sens à votre plaisanterie. Appelons donc un chat un chat…

- Je n'aime pas ce terme…

Je ne dis rien et il me sembla que cette attitude lui plût.

- Bref ! dit-il dans un geste de main de renvoi en arrière. 

Toutefois, il continua à me regarder dans les yeux. Puis je vis une sorte de satisfaction sur son visage. Troublée, je souris quand même.

- Vous savez ce qui me plaît en vous ? Vos yeux, le fond…le fond… le fond ! ressassa-t-il sur trois tons différents !

- Je suis contente pour vous ! fis-je un peu surprise et gênée à la fois.

Il se leva, me tendit la main et ajouta : « Puis-je vous embrasser?... sur les joues. »

- Oui, bien sûr ! je lui tendis mes joues l’une après l’autre.

Le bus arrivait à un arrêt. L’homme me serra de nouveau la main et descendit aussitôt. Il poursuivit sa route dans la même direction, les mains dans les poches. Il sifflait un petit air gai. Quand le bus l’eut dépassé, il me fit un petit signe en levant la main.

Comme d’habitude, en rentrant, je commence par le courrier. Des lettres, il y en a chaque jour : quatre  sont arrivées aujourd’hui. Des réponses à ma demande d’emploi.

Je sais à peu près ce que j’y trouverai tant j’en ai l’habitude mais j’espère, comme chaque fois, que la perle rare se trouverait dans l’une des lettres. Je les ouvris l'une après l'autre, mais hélas ! la perle rare, c’est pour demain peut-être ! Je rangeai chaque lettre dans sa catégorie, toutes trouvaient place dans l’une de ces trois :

 Suite à votre lettre de candidature, nous avons examiné votre dossier, avec le plus grand soin et avons bien noté l’intérêt qu’il présente.  Cependant, nous sommes au regret de vous informer que nous ne pouvons y répondre favorablement… C’est la réponse la plus fréquente.

Nous avons bien reçu et examiné votre dossier pour un poste au sein de notre Société. Malheureusement, les renseignements que vous nous donnez ne coïncident pas avec les profils des postes que nous avons à pourvoir actuellement. Nous sommes donc au regret de vous informer que nous ne poursuivrons pas l’examen de votre dossier...  Cette catégorie est la moins agréable, elle sous-entend qu’il n’y a aucune possibilité de relance.

Les lettres de ces deux catégories ont toutes cette particularité, lorsque celles-ci sont signées, elles ne le sont jamais par le directeur des ressources humaines mais un PO précède la signature.

Enfin les lettres de la troisième catégorie :

Vous nous avez adressé votre candidature pour étude et la valeur de votre dossier lui a permis d’être         intégré à notre démarche de sélection. Cependant, compte tenu du contexte d’exigence actuelle des entreprises, les choix se fondent sur des différences minimes. En conséquence, malgré la qualité de votre candidature, nous ne pouvons lui donner une suite favorable...

Faute de la perle rare, cette réponse est un peu l’eau est bonne pour le cœur du jour.  Il y a de l’emploi, je postule ! je trouverai la  "source ". Cette nuit, avant de m’endormir, j’ai relu ce passage du livre d’Antoine de Saint–Exupéry :  Ce qui embellit le désert, dit le petit prince, c’est qu’il cache un puits quelque part . Je l’avais souligné en jaune, il y a quelques jours. C’était qu’il répondait à mes préoccupations du moment. Il est un peu comme le cri pour se requinquer. Mais depuis hier, il revêt tout un autre intérêt, à l'issu de la visite de la petite fille rieuse. Le livre lui était tombé entre les mains. En feuilletant, elle trouva le passage souligné en jaune.

- C’est quoi ça ?  dit-elle

- Tu sais lire !

 Elle se mit en face de moi et lit à haute voix le passage souligné.

- Tu cherches aussi un puits ? fit-elle.

- Je cherche l’eau !

- C’est dans le désert que tu cherches l’eau ?

Elle a ri et vint se mettre à côté de moi, le livre entre les mains.

- Mais où veux-tu que je la cherche moi ! partout c’est le désert, tu sais !

- Alors il faudrait que tu marches longtemps dans le sable pour trouver l’oasis ou que tu creuses profondément dans le sable ! Tu peux tout cela, toi ?

- Oui et non, oui ! Je n’ai pas le choix, je veux boire ! Mais sais-tu, le désert, c’est pas partout pareil et ce n’est pas toujours pareil ! Je pris un crayon et une feuille blanche et me mis à griffonner. Tiens, lui dis-je, l’oasis est là, au pied de cette dune!  Je dessinai une flaque d’eau. Ce n’est pas un mirage. Tu vois bien qu’il y a un dattier, un cactus et de l’herbe ! ajoutai-je.

Elle regarda avec intérêt l'illustration, releva la tête et me fixa longuement.

-  Il y a aussi le ciel, même dans le désert ! laissa-t-elle tomber.

- Tu as raison ! au désert il y a le ciel, le soleil …

-  Et la pluie tombe du ciel.

- Tout à fait ! Même au désert il peut pleuvoir : une fois l’an, tous les dix ans… ou une fois un siècle sur deux ! Mais qu’importe ! c’est peut-être bien aujourd’hui jour de pluie comme c’est jour de marché au village ! Tu vois qu’il y a un nuage, ce n’est pas un cumulo-nimbus, mais ça ne fait rien…il le deviendra un jour… ou d'un instant à l'autre, il pleuvra !

J’avais la gorge nouée et cela ne passa pas inaperçu à la petite fille.

- Tu veux pleurer ? Non, ne pleure pas ! Tu vois qu’il y a de l’eau dans le désert ! dit –elle.

- Oui, je le savais ! Je faisais juste semblant ! il y a beaucoup de choses au désert !  Cela pour lui dire qu’au désert, on peut être désaltéré d’une manière ou d’une autre !

Mais la petite fille avait son caractère. Elle rouvrit le livre et me montra le serpent au pied du mur où était perché Le Petit Prince ! Elle me murmura à l’oreille : « Il y a ça aussi dans le désert : c’est dangereux le serpent, ça donne la mort ! ». Puis elle partit dans un rire qui n’a rien de celui que l’on aime entendre d’un enfant. Surprise, je ne m’y attendais pas du tout.  Ma riposte ne tarda pas, mais je me demandai d'abord s’il fallait lui répondre en petite fille ou en adulte. Après une seconde de réflexion, je décidai de répondre comme je suis, c'est plus sûr.

Je trébuchai sur quelques mots avant de me ressaisir.

 

 - Holà, mais lui n’est pas du tout méchant au désert !

- Ah oui ?  fit la petite fille.

- Mais bien sûr ! Tu sais, je pense à tout ce que j’ai appris de ma mère.  Elle est très sévère en langage. Avec elle, on ne peut pas dire n’importe quoi pour un nom ! Ainsi, elle n’apprécierait  pas ce nom : "serpent". Elle dirait que c’est ordinaire comme un nom de fille !

La petite fille a ri et moi aussi.

- Il s’appelle quoi alors ?

- Tu sais, le mot serpent signifie qui rampe. Mais lui ne rampe pas ! il a seulement de petites pattes de rien du tout! Le fauve, le lion, lui rampe pour attraper sa proie. 

- Comment l’appelle alors ta mère…, le… ? Elle fit un mouvement ondulatoire avec la main.

-  " Le lien ". Quelque fois ma mère l’appelle " Le lien d’ici-bas ou terrestre ", c’est quand lui monte à la tête la nostalgie originelle ! Ne dis surtout pas que c'est primitif car elle répondrait : « Véridique ! »

Je fis une petite pause, pour voir si mon interlocutrice suivait.

- Continue ! fit-elle, intéressée.

- " Le mordant ", c'est son semblant, celui qui peut donner la mort. Il envoie au désert et " Le lien " renvoie du désert.

- C’est pour cela donc que les médecins et les pharmaciens l’ont ! il guérit.  La maladie, c’est un peu comme le désert ! dit-elle.

- Mais, c’est le désert, la maladie ! Tu sais, c’est aussi le symbole des vétérinaires et il est bleu !

- Chez le vétérinaire, il y a une croix bleue ! répliqua-t-elle avec véhémence.

- Oui, c’est le même !

- Comment ? dit-elle,  en me regardant avec malice.

- Tu sais, une fois dans l’histoire, des hommes étaient au désert, "Le bâton" fut "Le lien ". Il avala " Le mordant " et délivra ces hommes. Dans le désert où ils étaient allés, "Le bâton" fendit le rocher et ces hommes eurent de l’eau. Encore dans le désert, pour guérir des morsures de "Le mordant ", il fallait qu’ils regardent " Le lien " élevé sur "Le bâton", sur du bois,… et la croix … Je tremblais je ne savais comment dire la suite…

Je voulus lui dire de s’en aller maintenant pour éviter qu'elle me pose d'autres questions. Elle m’avait conduite là où je ne m’y attendais pas…

Pendant que j’étais plongée dans mes pensées, la petite fille s’occupait bien de son côté. Et ce fut un ouf ! lorsqu'elle laissa tomber ceci: "Le roi lion est un serpent ?" m’interpella-t-elle.

-  Le roi lion rampe ! m'empressai-je de répondre.

- Et le roi, c’est " Le lien " alors ! Elle paraissait enchantée de cette découverte ou faisait semblant.

La connaissant espiègle, je voulus prendre les devants pour parer à ses "coups".  J’ai en mémoire les recommandations de ma mère : « Un enfant, n’est pas un enfant… ! »

- Pour les hommes ! Vois-tu, maintenant en l’appelant comme ma mère, "Le lien ", tu comprends bien qu’il soit avec Le Petit Prince ?

- En effet, il a relié Le Petit Prince à sa fleur ! dit la petite fille.

- Il a donné à boire à l’aviateur, puisque, il est aussi la corde pour tirer l’eau du puits ; une corde, c’est près d’un puits, c’est le lien avec l’eau ; c’est à la corde près d’un puits qu’on reconnaît un puits qui a de l’eau et la bonne !

- Oui !

Je ne sais pas ce qu’elle a compris, moi non plus d’ailleurs ! mais qu’importe ! je me suis imposée. Pour le reste, je corrigerai le tir plus tard. Cela pour la petite fille qu’elle est, quand même "un enfant n'est pas un enfant !"

- Tu vois que la fin de l’histoire du Petit Prince n’est pas du tout triste : "Le lien " n’est pas le rampant  ! Nous pouvons continuer l’histoire du Petit Prince, si tu veux !

- Oui, je veux ! dit-elle

- Bien, Le Petit Prince n’est pas mort !

- Oui, il l’a dit lui-même.

Je demandai à la petite fille de revenir une autre fois, nous écrirons toutes les deux la suite de l’histoire du Petit Prince.

Avant de s’en aller, elle rouvrit le livre à la page du dessin que l’aviateur avait fait, plus tard du petit bonhomme qu’il avait rencontré dans le désert. Elle me le mit sous le nez et s’enfuit, riant et clamant : « Vive Le Petit Prince  » ! Toute la journée j’ai ruminé notre causerie. Et ce soir encore elle est présente dans mon esprit.  J’ai pensé au Monsieur du bus aussi, je ne sais pas et je ne saurai jamais ce que je lui ai apporté, tout comme la petite fille ne sait pas et ne saura jamais ce qu’elle m’a apporté. De même, le Monsieur à la sortie du métro pourrait bien se dire un jour en se rappelant de moi : " Qu’est ce que j’ai pu apporter à cette personne… ?".

Oui, en voulant m’imposer coûte que coûte à la petite fille, je ne me suis jamais trouvée aussi près de ce que je cherchais sans le savoir en vérité… Ce soir, je peux dire ainsi : "J’ai rencontré Le Petit Prince, il est revenu !" Je m’exclamai : "Tiens, je vais écrire à l’aviateur, après tout il l’a demandé ! "

Comme je n’avais pas sommeil, je pris une feuille et un stylo et me laissai aller.

 " S’il vous plaît… lis-moi ma lettre… Je commence ainsi, c'est à cause des conseils du renard, tu sais ! Aussi, en ces quelques mots, je t’ai aperçu, approché et apprivoisé. Tu es mon ami. Je t'écris pour deux raisons. La première est toute simple. J’ai toujours été haletante. Mais c'est à cause de la course, contre la soif !   Je n’ai plus soif, il n’y a plus de raison que je sois encore haletante. Mais comme tu le sais, ce n’est pas si facile d’arrêter… j’essaie. Quand j’écrivais, je mettais la virgule partout, tout comme les phrases ou les mots hachés d’une personne essoufflée, d’ailleurs on m’a souvent dit que je parle en hachant les phrases, les mots… Personne n’a compris que c’est à cause de l'essoufflement, cette course contre la soif ! Alors, lis-moi ma lettre ! aussi je saurai si quelque chose a changé de ce côté haletant ! on ne demande cela qu’à un ami !

Voici la seconde raison pour laquelle je t'écris : j'ai lu ton livre, avec tout le sérieux que je peux avoir. Je l’ai lu au moins trois fois depuis quarante ans. Je vais te parler de la dernière fois, c’était hier ! Tu riras peut être et tu diras que je n’ai rien compris à ton livre, pardon, à ta rencontre avec Le Petit Prince. Mais qu’importe ! Je sais seulement que tu ne te fâcheras pas, tu ne le peux, toi, l’ami du Petit Prince. Et mieux encore, tu chercheras à comprendre ce que j’ai compris à ta rencontre avec Le Petit Prince…  Et cela me ravit ! Je reviens du désert en refermant ton livre hier soir. Je l'ai rencontré, Le Petit Prince, il est revenu ! Il avait la voix d’une petite fille, gaie, espiègle, rieuse mais qui écoute ! C’est tout près de là où tu l’as vu tomber. Et le souffle du désert m’a raconté qu’il y revient depuis le jour où il t’a quitté… à ta recherche, mais il y trouve toujours un ami, un vrai comme toi… ! Le puits est toujours là, son eau aussi bonne comme tu le sais… l’autre y est aussi, "Le lien ", la corde pour tirer l’eau ou l’éclair jaune. "Le lien ", ainsi ma mère le nomme.  Elle dit qu’il renvoie du désert tandis que son semblant qui hante les ruines des villages qu’il a détruit, "Le mordant" qu’elle l’appelle, envoie au désert...  tu en sais quelque chose, toi.

 Je ne puis te parler du Petit Prince sans te donner des nouvelles de ton ami, Léon, qui comprend tout.

Je suis sûre qu’il comprend tout… s’il a faim et froid. Je l'ai aussi rencontré, Léon... Je sais que pour lui, c’est comme s’il a faim et froid… c'est pour l'enseignement des hommes…  car l’important ne se voit pas… ce qui rassasie ne se voit pas !

Cependant, combien de gens ne sont pas Léon ton ami mais ont faim, soif ou froid parce qu’ils n’ont pas de travail ? Non pas qu’il en manque, mais à cause de je ne sais quoi de « Ce n’est pas permis… ça peut attendre… !» Au nom de quoi ? Au nom du profit ? du profil ? la recherche de puissance pour une liberté irrationnelle ? ou rien de tout cela ?

En effet, je m'en suis aperçue il y a peu de temps. Je remettais de l'ordre dans mes lectures, ce qui m'amena à reprendre quelques unes.

Il y a vingt ans je lisais "Le procès" de F. Kafka.  J'avais versé des larmes à "Comme un chien ! " de Joseph K. De même j'avais pleuré la petite Matriocha et haï Stavroguine en lisant "Les possédés". Je m'étais vite consolée. Comme beaucoup, me disant aussi que c'était l'absurdité kafkaïenne et une de ces vues de transes de Dostoïevski. Cependant, c'est davantage ! Joseph K., tout comme "l'homme" dans "L'étranger" de A. Camus, était un adulte qui faisait son travail au milieu d'enfants "terribles". Quant à Stavroguine, c'était un homme qui avait choisi. Le seul homme de la "ménagerie" qu'il avait montée. Il mérite le pardon : sa confession et ce qui s'en est suivi, repentance, remord ou échec ?...  Matriocha ne peut plus mourir… Cela est plein d'enseignement pour tout homme… Cependant, sa "ménagerie", lui disparu, se chercherait un repreneur… elle le susciterait. Quant aux enfants " terribles", se trouver un Joseph K. est une raison d'être. Joseph K. n'est pas un jouet !

Tu comprends que beaucoup de gens puissent être privés de travail, qu'ils aient faim, soif ou froid ? Alors que le travail est un droit ; le travail est un devoir. Et l'éthique n'est pas la petite morale "bourgeoise", elle n'est pas non plus le refuge de la faiblesse : le travail n'est pas un champ de bataille où l'on meurt, mais un champ de créativité et de production où l'on donne la vie.

J’ai dit à la petite fille que nous écrirons, toutes les deux, la suite de ton livre, "Le Petit Prince".

Je lui remettrai d’abord ce dessin, cette boite, et si elle me demande ce que c’est, je lui dirai : "C’est le travail est un droit; le travail est un devoir ! tu en as besoin pour toi et pour les autres. C'est également, "L’eau peut aussi être bonne pour le cœur !" chaque fois que quelqu'un s'en réjouira.

Cela ne veut pas dire que je me débarrasse de mon "Le travail est un droit ; le travail est un devoir !" C'est mon "étoile et ma fleur".

Et comme tu le sais bien, quand on a une étoile avec une fleur qu’on aime, toutes les étoiles sont belles !... Et lorsque l’on a bu à la source d’une étoile et qu’on n’a plus soif ou que l’eau a été bonne pour le cœur, alors on voudrait que son étoile soit une source qui verserait l’eau à tous !

Je confie ma lettre au souffle de la nuit, messager familier. Lui seul sait où te trouver, dans l’infiniment grand ou dans l’infiniment petit des choses. Il est aussi "Le lien ". Et, une nuit, un bruissement, le souffle messager, me réveillera … Je saurai… Je dirai :  j’écoute !  Alors tu pourras me commencer la lecture de ma lettre !"  

Au réveil, le matin, j'ai retrouvé le livre ouvert à la page où la petite fille rieuse me l'avait laissé, l'autre soir. Je croyais l'avoir refermé, le livre,  mais non ! »

Aminta

Il y a de l’eau dans le désert, cela est vrai. Nombreuses sont les technologies actuelles pour faire jaillir l’eau du sable ou de la roche du désert.  On peut également y provoquer la pluie dans certaines conditions météorologiques.

Il y a de l’eau au désert, cela aussi est vrai : c’est lorsque des hommes et des femmes, pour répondre « oui » à la vie gagnent leur combat de tous les jours.

Il y a de l’eau au désert est encore vrai : ce sont les résultats de la recherche scientifique et technologique qui apportent une amélioration à la vie quotidienne des hommes. 

En tout cas, à la source du Petit Prince, à en croire Aminta, l’eau est pour tous, gratuite et bonne. Elle étanche toute  soif!   


Quelques références bibliographique
[1] - Saint-Exupéry A. de, " LE PETIT  PRINCE", 1999, éd. Gallimard Jeunesse, 123 pages 
[2] - Aminta , "à la source du Petit Prince",  Lien , 2004, n°3, p 24-28
[3] -Camus A., "Noces suivi de l'été",éd.Gallimard,1993,p.68-69
[4] - Hodge N., et Anson L.,  " Piero della francesca  - Résurrection", dans "L'Art de A à Z", éd. PML, 1996, 400 pages