Alimentation et nutrition ñ


Sciences et techniques


Article n°4


Composition des aliments  Article aliment-et-developpement.com - Mai 2017

Les lipides 

Substances organiques, les lipides sont constitués d'acides gras et de leurs dérivés.  Les acides gras estérifient le plus souvent un alcool.  

Les lipides sont des substances chimiques peu ou pas du tout solubles dans l'eau, mais  solubles dans les bases et les solvants organiques.  

Des composés polycycliques, insolubles dans l’eau, comme le cholestérol (un stérol) et ses dérivés sont rangés dans la classe des lipides.  

Les lipides sont, avec les glucides et les protéines, les principaux éléments du tissu du vivant et de l’ingénierie métabolique de ses cellules.  Ils sont dans toutes ses productions. Seule leur teneur peut varier d'un tissu à l’autre, d’une source de l'aliment à l’autre et, pour une source donnée, d'un produit à l’autre. 

La structure des lipides 

Les acides gras 

La molécule des acides gras est une chaîne carbonée plus ou moins longue. Les acides gras sont des composés aliphatiques. Les liaisons carbone-carbone sont des liaisons simples et/ ou double. Les acides gras sont classés en deux groupes principaux : les acides gras saturés et les acides gras insaturés.

Les acides gras saturés.  La structure carbonée ne contient aucune double liaison carbone-carbone.  Ils ont pour formule CH3 –(CH2)n – COOH où n est le nombre de groupement (_CH2_) de la chaîne carbonée. 

Les acides gras insaturés. La présence de double liaison carbone-carbone dans leur structure caractérise et différencie les acides gras insaturés : ils sont   monoinsaturés lorsqu'il  y a une seule double liaison et polyinsaturés lorsqu'il y a au moins deux doubles liaisons.

Des acides gras peuvent avoir le même nombre d'atomes de carbone.  La présence et le nombre de doubles liaisons les distinguent (Tableau II et III) .

Les acides gras peuvent être  représentés  par la chaîne carbonée ou  par divers éléments de cette structure :

- le  nombre d’atomes de carbone de la molécule (Cn ou Cw);

- la configuration géométrique de la double liaison de la molécule (cis ou trans);

- le nombre de doubles liaisons de la molécule (x =1,2,3 ou plus);

-  la position des doubles liaisons à partir du groupement méthyle (n-y ou w-y ou wy) ou du groupement carboxyle indiquée  par  le signe Dz  (z étant le premier atome de carbone de la double liaison). 

Il en résulte plusieurs nomenclatures usuelles écrites comme suit : n : x (cis ou/et trans), n-y;  n : x Dz   ; n : x wy  ou wy

La figure 16, ci-dessous, explique les modes de numérotation des atomes de carbone. Le tableau  indique les représentations correspondantes.  

Figure 16 : Numérotations des atomes de carbone et position des doubles liaisons. Exemple de l'acide linoléique.

-         La position des atomes de carbone et celle des doubles liaisons sont notées par rapport au groupement carboxyle. Celui-ci porte le carbone 1 de la molécule et "n" ou "west le numéro de l'atome de carbone du groupement méthyle.

-         La position des atomes de carbone et celle des doubles liaisons peuvent être décrites par rapport au groupement méthyle , dans ce cas, "n-17" ou "w-17" est la position de l'atome de carbone du groupement carboxyle.

Tableau I : Représentations de  l’acide linoléique

"n : x (cis ou/et trans), n-y" 

"n : x Dz "

"n : x wy "

18 : 2 ciscis n-6, n-9 

18 :2 D9,12

18 : 2 w3,6


 
Les tableaux II et III, ci-après, donnent les représentations des principaux acides gras de l'alimentation.
Tableau II - Représentations de quelques acides gras saturés
Les alcools des lipides  

Le glycérol et les stérols sont les alcools le plus souvent associés aux acides gras dans les lipides de l'alimentation humaine. 
Le glycérol
Le glycérol, est un trialcool à 3 atomes de carbone.     La molécule du glycérol 
forme avec les acides gras des mono-, di- et triesters.

Le glycérophosphate (acide glycérophosphorique)

L'acide phosphorique peut estérifier un des alcools du glycérol pour former le glycérophosphate (Figure 17). 

Figure 17 - Glycérol et glycérophosphate 

Les alcools azotés
La sérine, l'éthanolamine  ou la choline peuvent former 
des esters avec l'un des groupements -OH- de l'acide phosphorique

Figure 18 : Alcools des phosphatides complexes 

La sphingosine
La sphingosine est l'alcool des sphingolipides. Elle comprend 18 atomes de carbone, une fonction amine primaire (-NH2-), un alcool primaire et un alcool secondaire (Figure 19)

Figure 19 - Sphingosine et psychosine

La psychosine
Dans certains lipides, un ose est associé à la sphingosine par une liaison osidique avec l'alcool primaire  (Figure 19)

Le cholestérol 

Le cholestérol est composée d'un noyau polycyclique, le cyclopentano-hydrophenanthrène  un dérivé du stérane et d'une chaîne aliphatique (Figure 20). La molécule contient une fonction alcool secondaire par le carbone 3 qui porte un groupement hydroxyle.  Le cholestérol est un stérol, un alcool dérivé du stérane. C'est un composé solide à température ordinaire. Il est insoluble dans l'eau. 

Figure 20 : Le cholestérol, les parties A, B, C et D dérivent du stérane 

Les classes de lipides

Les lipides sont classés selon deux critères principaux la composition de leurs molécules et leurs propriétés physico-chimiques.  

La classification selon la composition de la molécule

La nature des molécules constituantes du lipide est le premier élément de la classification.    

Les lipides neutres 

Les mono, di et triglycérides constituent la classe des glycérides.  Dans ces lipides, une, deux ou les trois fonctions alcool de la molécule de glycérol peuvent être estérifiées par un, deux ou trois acide gras dont les radicaux sont dénommés R1, R2 R3. (Figure 21)

Figure 21 : Glycérol et glycérides 

Les phospholipides

Les glycérophospholipides et les phosphatides forment la classe des phospholipides 

Dans les glycérophospholipides, l'un des alcools primaires du glycérol est estérifié par l’acide phosphorique pour donner le glycérophosphate qui, à son tour, peut être estérifié par deux acides gras (Figure 22). On a un acide phosphatidique. 

 Figure 22 : Glycérophosphate et phospholipides

Dans les phosphatides, l’acide phosphorique du glycérophosphate peut estérifier un autre alcool (l’inositol, la sérine ou ses dérivés l’éthanolamine, la choline). Ces phosphatides portent respectivement les noms de phosphoinositol, phosphatidyl sérine, phosphatidyl éthanolamine (céphaline), phosphatidyl choline ou lécithine ce sont les phosphatides complexes (Figure 23).

Figure 23: Phosphatides complexes 

Les stéroïdes

Le cholestérol, la (les) vitamine(s)D, les acides biliaires et les hormones (cortisol) stéroïdes d’intérêt alimentaire et nutritionnel sont regroupés  communément sous l’appellation de stérols. Ils ont tous en commun les dérivés du noyau phenanthrène  (parties A, B et C du cholestérol) ou le noyau stérane (parties A, B, C et  D du cholestérol). 

Les hormones génitales (oestradiol et testostérone), les hormones de la corticosurrénale (aldostérone, cortisol, hormones androgènes) tous ayant un rapport plus ou moins direct avec l'alimentation et la nutrition, dérivent  du cholestérol.

Figure 24 - Cholestérol et calciférol

 

Les sphingolipides

Les principaux sphingolipides sont les sphingomyélines et les cérébrosides. 

Dans la sphingomyéline, l'acide lignocérique (acide gras saturé C24) est lié à l'amine de la sphingosine et la phosphocholine forme un ester avec l'alcool primaire (Figure 25). 

Figure 25 : Sphingomyéline et cérébrosides                 

Dans la cérébroside, l'acide lignocérique (acide gras saturé) est lié à l'amine de la psychosine. Sphingomyélines et cérébrosides sont abondantes dans le cortex cérébral.

Les cérides

Pour ces lipides, l’acide gras et l’alcool qu’il estérifie sont tous deux à longue chaîne d’atomes de carbone ; les plus connus sont le blanc de baleine et la cire d’abeille. Ces lipides ne sont pas métabolisés par les animaux supérieurs et l’homme. 

La classification selon les propriétés physiques et chimiques

Les acides gras sont insolubles dans l’eau, mais solubles dans les bases (soude, potasse, ammoniaque). La formation des savons ou saponification résulte de cette propriété. Ainsi on classe les lipides en lipides « saponifiables » et « non saponifiables » ou insaponifiables.

Les lipides « saponifiables »

Cette classe de lipides comprend les lipides neutres (les glycérides) et les phospholipides.

Les lipides insaponifiables

Certaines substances biochimiques par leur caractère de solubilité sont proches des lipides. Ce sont les caroténoïdes, les stérols libres, les hydrocarbures. Ils sont insolubles dans l’eau, mais ne forment pas de savon avec les bases.

Les fonctions

 La texture des aliments

En alimentation, les lipides constituent la classe des corps gras. Ils contribuent à leur texture. On classe les corps gras  en graisses et huiles selon leur état physique, plus ou moins solide ou liquide, à 20°C. Cet état est lié à leur composition en acides gras saturés et insaturés.

Les graisses sont constituées en majorité d’acides gras saturés, tandis que dans les huiles, les acides gras insaturés sont les constituants les plus importants. 

 Le rôle biologique 

Le rôle biologique des lipides est multiple. Avec les glucides, les lipides constituent les principales substances de réserve dont la dégradation libère l'énergie nécessaire au métabolisme cellulaire. La dégradation d’un gramme de lipide libère 9 Calories en moyenne. 

Les lipides sont des constituants de la membrane cellulaire et de celles des structures cytoplasmiques. Composants des lipoprotéines et des sites d'échanges entre les milieux intra et extra cellulaire,  les lipides jouent un rôle important dans leur propre transport dans le sang et leur absorption par la cellule

Des lipides, les stéroïdes, sont des hormones agissant au niveau du génome favorisant la synthèse d'ARN et de protéines spécifiques du domaine de la reproduction.

Les sphyngolipides sont des composants du système nerveux ,fibres nerveuses, cortex cérébral.

Le rôle physiologique

Les lipides, en particulier les lipides neutres, par leur caractère amphotère, sont des émulsifiants et contribuent à la digestion, en présence des acides biliaires

Les sources des lipides

Les sources  végétale et animale

Sur le plan alimentation, les lipides sont surtout apportés à l'organisme par les graisses et les huiles d’origine végétale et animale   (Figures 26 et 27 )

Les huiles

Les huiles sont d’origine végétale, animale ou minérale. L’alimentation humaine utilise que les huiles végétales et animales. Ces huiles alimentaires ont un point de fusion autour de 10°C.  Elles diffèrent par leur composition en classe d’acides gras d’une part et en principaux acides gras pour une classe donnée, d’autre part (Figure 26). Les huiles végétales ont une teneur en acides gras saturés comprise entre 10 et 20%. C'est la teneur en acides gras insaturés qui les distinguent particulièrement. La teneur en acide gras monoinsaturés est croissante de l'huile de tournesol à l'huile d'olive et c'est l'inverse en ce qui concerne les acides gras polyinsaturés. 

Figure 26 : Teneur en acides gras des huiles d'utilisation courante

Les huiles d'origine animale de l'alimentation les plus connues sont celles des poissons. L'huile de foie de morue en est un exemple. 

Cependant, il faut souligner l’existence d'huiles minérales que rien ne  distingue, a priori, à l’œil nu de certaines huiles alimentaires (mode et conditions d'extraction ou d'entreposage). 

Les beurres

On appelle «beurres» les corps gras dont la température de fusion est autour de 30°C. Ils sont d’origine animale et végétale. Seul le produit issu du lait, contenant l’acide butyrique, peut porter l’appellation de beurre. Les autres «beurres» sont des graisses.  Les graisses végétales se distinguent les unes des autres par leur composition en différentes classes d’acides gras (Figure 27).  

Figure 27 : Teneur en acides gras des beurres d'utilisation courante

Les graisses

Les graisses sont d’origine animale. Les graisses animale fondent aux environs de 40°C tandis que le point de fusion des graisses végétales "beurres" est autour de 30°C.

Les acides gras essentiels

Les acides gras essentiels constituent la classe des mono et polyinsaturés (Tableau III). L’organisme humain ne peut synthétiser ces acides gras, ils sont apportés par l’alimentation. Les huiles et, dans une moindre mesure, les graisses végétales en sont pourvues (Figures 26 et 27).

Tableau III- Représentations des acides gras insaturés

Que représentent ces acides gras essentiels  d'un point de vue de l'alimentation?  La double liaison  n'est pas synonyme de  qualité  nutritive:  les acides gras insaturés sont les substrats de l'oxydation des lipides, de même que leurs autres composants non saturés (les vitamines liposolubles,  leurs précurseurs et leurs dérivés). Les principaux facteurs favorisant cette oxydation sont  :  la lumière, la température, certains métaux et l'action d'enzymes (les lipoxydases  et les lipases) en présence d'oxygène. Cette oxydation a pour conséquence la formation de radicaux libres et de composés volatils "d'odeur de rance". 

L'oxydation des lipides et la  formation de composés indésirables peut se produire à toutes les étapes après récolte de la matière première oléagineuse et ou après extraction du corps gras (huilebeurre et graisse). Aussi, dans l'industrie, les outils de production, le conditionnement et les conditions de stockage sont veillés avec précaution

L'oxydation de ces acides gras essentiels peut se produire à la cuisson des aliments entraînant, sous l'effet de la chaleur, des réactions entre constituants, à l'instar de la réaction de Maillard. Ces réactions de brunissement peuvent déprécier la qualité nutritive de l'aliment.  

La double liaison dans la molécule des acides gras insaturés peut être un facteur limitant de l'alimentation : au cours de la transformation, de l’accommodation, de la conservation et pour l'appréciation sensorielle prélude à la fonction nutritionnelle de l'aliment. 

La source métabolique des lipides

L’organisme humain peut synthétiser les acides gras dont il a besoin, exceptés les acides gras essentiels. L'acétyl CoA et le glycérol en sont le point de départ.  La synthèse du cholestérol débute par la réaction entre l'acétyl CoA et l'acide mévalonique. 

Les lipides et l'environnement 

Les huiles, beurres et graisses résidus domestiques peuvent affecter l'évacuation des eaux usées en milieu urbain, par la formation des "savons". On se souvient encore de l'alerte donnée par la presse, il y a quelques années à propos du "savon" des égouts de Londres Les autres conséquences de la formation de ces "savons", détergents, concernent l'écosystème des cours d'eau recevant les eaux d'évacuations. Pour les mêmes raisons écologiques, ces "savons" peuvent limiter l'utilisation des eaux usées. Face à ces problèmes, la récupération, le traitement, la réutilisation non domestique de ces huiles et graisses s'imposent. 

Certaines graisses d'origine animale, le   blanc de baleine et la cire d’abeille, ne sont pas métabolisées par les animaux supérieurs et l’homme. Ces graisses utilisées dans l'industrie, peu biodégradables, peuvent être polluantes. 

Les hydrocarbures constituants du plastique sont assimilés aux lipides pour leur insolubilité dans l'eau. Le projet récent de la "chenille dévoreuse de plastique", qui fait rêver les scientifiques, est aussi un espoir pour traiter les déchets domestiques issus de l'utilisation de produits à base de ces graisses non alimentaires. Par ailleurs, il n'est pas rare dans certaines contrées du Monde, chaudes et sèches, de voir des sachets plastique attaqué par des termites... les utiliser pour assainir l'environnement ? mais quelles conséquences sur la biodiversité  et  quelle portée éthique ? peut-on s'interroger. 

Les lipides dans l'histoire de l'aliment

Les sources de lipides, tout comme celles des glucides caractérisent les habitudes alimentaires des régions du Monde.

Tout comme les glucides, les lipides et l'histoire de l'aliment concerne ce qu'ils représentent dans la pensée des hommes. A ce sujet, on peut citer l'huile d'olive. Avec le pain et le vin, l'huile d'olive est communielle et universelle.

L'évolution de l'alimentation, liée aux progrès technologiques, concerne les produits glucidiques et lipidiques. L'appât des nouveaux produits, d'utilisations faciles, appetants et appétissants, place les lipides comme les glucides au premier plan des produits de veille de l'hygiène nutritionnelle.   

Les lipides de l'alimentation et la santé humaine

Outre que les lipides sont avec les glucides sources d’énergie comme nous l’avons vu, les lipides de l'alimentation sont également la source d’acides gras essentiels. Ils appartiennent à la classe des acides gras polyinsaturés. Certaines vitamines dites liposolubles sont rangées dans le cadre des lipides. 

La dégradation des lipides, source de radicaux libres et de composés volatils déprécie la qualité nutritive des aliments. Cependant, les acides gras insaturés ou acides gras essentiels ont un effet positif sur le transport du cholestérol dans le sang. De ce fait ils contribuent à diminuer l'excès de cholestérol dans le sang et l'encrassement des parois des vaisseaux sanguins. Les origines de l'excès de lipides dans le sang sont nombreuses (Figure 28).





Figure 28 : Sources des lipides du sang 

Les maladies nutritionnelles sont aussi celles causées par l'excès de lipides dans le sang, certaines classes de cholestérol (eu égard à la structure de transport par laquelle il y est présent), ou dans certains tissus et organes (l'obésité).  Les hyperlipidémies, excès de lipides dans le sang  sont diverses  (Figure 29)

Figure 29 : Les hyperlipédémies ou hyperlipoprotéinémies ou encore dyslipoprotéinémies 

La prévention, la physiopathologie, les enquêtes nutritionnelles et le traitement des maladies de l'excès de lipides dans le sang (l'alimentation en est la cause principale) sont de nos jours sujets de santé publique partout dans le monde... Suite